Romain Royer


Extrait du « Mémoire pour servir à la connaissance particulière de chaque habitant de l’Isle de Bourbon, divisés par les quartiers qu’ils habitent » rédigé en 1709 par Antoine Labbé dit Antoine Desforges-Boucher (1679-1725) alors garde-magasin de la Compagnie des Indes en l’Isle de Bourbon (aujourd’hui Île de la Réunion).

Source : Collection MARGRY, relative à l’histoire des Colonies et de la Marine françaises (vue 74).
Transcrit d’après une copie manuscrite du XIXème siècle dans le respect de l’orthographe (à l’accentuation, ponctuation et majuscules près pour une meilleure lisibilité).
⚠️Ce mémoire est destiné à un public averti, il contient des propos parfois controversés, offensants ou choquants.
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Romain Royer

Est un créol, à peu près blanc, âgé de 23 ans, homme sans éducation et sans sçavoir vivre, ivrogne et le plus franc paresseux de toute l’isle, quoyque fort adroit et habilt charpentier, qui d’ailleurs n’a pas de mauvaises inclinations, c’est une bonne beste, que l’on mène assés comme on veut. Il a pour épouse Anne Rivière creole à peu près blanche, qui est une des femmes de toute l’isle, qui a le plus d’esprit de fort bonne manières, et qui est fort bonne lingère et qui avec cela, a le talent d’estre une des plus grandes débauchées de toute l’isle, et qui croirait avoir fait un grand pêché mortel, si elle avait refusé le premier homme qui se présente à elle, elle est même de cotterie, avec cette Marie Anne Fontaine dont j’ay si bien parlé, cy devant, et quoy que son mary se pique d’une grande jalousie, et d’estre difficile à tromper, elle fait si bien en sorte, avec un air composé, et une grande douceur dans l’humeur de se donner tous ces infâmes et sales plaisirs, sans que son mary aye lieu de se plaindre d’elle, car elle prend le soin de le faire yvrer, ce qu’il aime beaucoup à faire par quelqu’un de ses ruffiens, pendant qu’elle se divertit avec les autres, outre que cet homme n’ayant point de bestiaux, ny ne cultivant point une bonne espace de terre qu’il possède à la montagne, il ne vit que de la chasse et que de la tortue, elle sçait profiter des moments qu’il est à l’n ou à l’autre de ces endroits ; en un mot c’est une publique ; ils ont eu de ce mariage un petit garçon, qui est encor fort jeune, et qui sera, sans doute mal élevé. Ils sont assés bien nipés et peuvent avoir 200 Ecus d’argent comptant que cette femme a acquis par son labeur, et n’ont paspour tous esclaves, qu’une petite Négresse et pour tous bestiaux qu’un cheval.



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