Hervé Fontaine ⭐


Extrait du « Mémoire pour servir à la connaissance particulière de chaque habitant de l’Isle de Bourbon, divisés par les quartiers qu’ils habitent » rédigé en 1709 par Antoine Labbé dit Antoine Desforges-Boucher (1679-1725) alors garde-magasin de la Compagnie des Indes en l’Isle de Bourbon (aujourd’hui Île de la Réunion).

Source : Collection MARGRY, relative à l’histoire des Colonies et de la Marine françaises (vue 59).
Transcrit d’après une copie manuscrite du XIXème siècle dans le respect de l’orthographe (à l’accentuation, ponctuation et majuscules près pour une meilleure lisibilité).
⚠️Ce mémoire est destiné à un public averti, il contient des propos parfois controversés, offensants ou choquants.
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Hervé Fontaine

Est un créol mulâtre agé de 32 ans, qui est des plus grands libertins de toute l’isle, il est ivrogne, jureur, joueur, médisant, menteur et tout à fait addonné à la gueuse quoy qu’il soit marié, il n’est pas mauvais charpentier, mais il est si paresseux, qu’il ne met point son métier en pratique, non plus qu’il ne se donne point le soin de cultiver une habitation qu’il a au Vieux St Paul, qui est assurément des meilleures de tout ce quartier, laquelle avec application luy fournirait suffisament de quoy subsister ; il a encor à la montagne une espace assés considérable de bon terrain qu’il laisse en friche, cela fait qu’il a beaucoup de peine à vivre, et que sa famille qui consiste en 4 garçons et 2 filles, ne vivent qu’avec peine, et n’ont pas une chemise à se mettre sur le corps, ce n’est pourtant pas manque qu’il n’ait eu d’assés bonnes éducations, mail il pratique mal ce que l’on a pris soin de luy apprendre, il est mutin, désobéissant et querelleur, en un mot, c’est un franc vaurien, il a pour femme Thérèse Damour créole mulatresse comme luy, qui ne manque pas de génie, bonne travailleuse, et qui n’est pas mauvaise couturière, laquelle n’a jamais donné occasion à la médisance, malgré le libertinage de son mary, mais sans éducation, et l’on peut juger comme doivent estre élevés des enfans par de tels pères et mères, il fait sa résidence au Parc à Jacques, où il élève quelques bestiaux, qui se multiplient d’eux mêmes et sans soins, dont le nombre est de 20 cochons et 50 cabrits, auxquels il ne touche, que lorsqu’il ne trouve pas l’occasion de voler les bestiaux d’autruy, à quoy il est fort sujet, ce qui est connu de tout le monde, pour de l’argent comptant, il n’en a , assurément point, car il ne sçait ce que c’est que d’en garder, et il aime mieux lorsqu’il luy tombe un écu entre les mains l’employer à une bouteille d’eau de vie, qu’à se mettre une chemise sur le corps.



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