François Cauzan


Extrait du « Mémoire pour servir à la connaissance particulière de chaque habitant de l’Isle de Bourbon, divisés par les quartiers qu’ils habitent » rédigé en 1709 par Antoine Labbé dit Antoine Desforges-Boucher (1679-1725) alors garde-magasin de la Compagnie des Indes en l’Isle de Bourbon (aujourd’hui Île de la Réunion).

Source : Collection MARGRY, relative à l’histoire des Colonies et de la Marine françaises (vue 54).
Transcrit d’après une copie manuscrite du XIXème siècle dans le respect de l’orthographe (à l’accentuation, ponctuation et majuscules près pour une meilleure lisibilité).
⚠️Ce mémoire est destiné à un public averti, il contient des propos parfois controversés, offensants ou choquants.
©️Vous êtes autorisé à copier tout ou partie de ce document à condition de créer un lien vers cette page.

François Cauzan

Est un créol mulâtre agé de 38 ans honnête homme ; sage comme un caton, point ivrogne, ny joueur, fort obéissant, et rendant service à qui il peut, bien attaché à la conduite de son ménage, et à la culture de ses terres, qui a eu de très bonnes éducations, il sçait lire et écrire, et est très bon charpentier, il a même esté prieur de la confrairie de Notre Dame de Mont Carmel, le fâcheux est pour luy, qu’il est attaqué de la goute qui l’oblige la pluspart du tems de garder la maison et le prive de pouvoir agir, autant que son inclination le porterait à le faire ; il a pour épouse, Louise Payet créole mulâtresse, qui est sans contredit l’exemple de toutes les femmes de l’isle, et à laquelle, l’on ne peut attribuer pour tout deffaut, qu’un peu de vanité, d’ailleurs, bonne ménagère, très sage, fort dévote, la meilleure lingère de toute l’isle, et qui, non seulement, prend soin de son ménage, et de sa famille, mais n’ayant point d’enfans, elle a jusqu’à 7 à 8 filles de ses parents, ou de ses amis, auxquelles elle apprend la lingerie et qu’elle élève avec toute l’éducation possible, aussy ces filles sont elles plus sages, qu’aucunes autres de l’isle, et les mieux instruites, et fait cela gratuitement, sans en retirer aucun salaire, au contraire, elle n’a pas un plus grand plaisir que de rendre ce service à tous ceux qui le veulent y envoyer leurs filles, pourvu qu’elle les connaisse sages ; le Sieur Jacques Aubert y a la sienne, qui est une de celles qui font le mieux, et qui sera un jour une très bonne lingère. Ce François Cauzan fait sa demeure au Parc à Jacques, où il élève avec grand soint une vigne que je luy ay vu planter, qui lui produit tous les ans, 7 à 8000 grapes de raisin monstrueux. C’est à son exemple, que ses voisins se sont donné la peine d’en planter, de sorte qu’il n’y a presque point d’habitant au Parc à Jacques, qui n’ait une vigne devant sa porte, c’est aussy à ce même endroit, où il élève ses bestiaux, dont le nombre est de 50 bœufs, 80 moutons et 40 cochons, il est avec cela un des mieux nipez, et des mieux logés de tous les habitans, et peut avoir 2000 Ecus d’argent comptant qu’il a amassés du fruit de son labeur, cultivant avec grand soin ses terres, à l’ayde de 6 Noirs et 3 Négresses qu’il possède, sur lesquelles il fait des récoltes assés considérables, pour le faire subsister très à son aise, et faire beaucoup de profit du surplus de son nécessaire , il possède pourtant beaucoup plus de terres à la montagne, qu’il n’en peut cultiver, et fait presque toute sa récolte dans les bas ; l’on ne peut se méprendre, en donnant beaucoup de pieds de poivriers à cet homme, car il en aura, très assurément, grand soin.



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *